Le passage de Jean 9 v 1 à 41 est bouleversant, dérangeant et d’une incroyable simplicité. A ce stade de son ministère, Jésus a déjà bousculé pas mal de conventions et de croyances à tel point qu’on vient juste d’essayer de le lapider dans le Temple. Mais cela ne l’empêche pas d’agir encore comme un révélateur de l’éloignement entre la pensée du royaume et celle du statuquo religieux de son époque.  Dans cette histoire, deux visions du monde se percutent autour de la guérison d’un aveugle, quel humour ! On a d’une part un aveugle de naissance, que tout le quartier connait : pour tous il est « l’aveugle ». D’autre part, nous avons les pharisiens et tout un tas de personnages tout à fait sûrs de ce qu’ils voient, de ce qu’ils savent.

L’aveugle vit concrètement une expérience étrange, qu’il raconte lui-même, décrivant simplement les faits : « L’homme qui s’appelle Jésus a fait un peu de boue, m’en a frotté les yeux, puis m’a dit : « Va à Siloé et lave-toi. » J’y suis allé, je me suis lavé et, d’un coup, j’ai vu clair. » Il n’y a aucun jugement, il n’essaie pas de comprendre pourquoi Jésus a opéré de cette manière. Il sait juste que Jésus l’a guérit. Il va être interrogé, discrédité, abandonné par ses parents, injurié et jugé par les dignitaires religieux….mais il ne change pas de discours et reste simple. Il sait ce qu’il a vécu, c’est tout. Sa simplicité va finalement l’amener à comprendre qui est Jésus et à croire tout simplement.

Les pharisiens, eux, sont certains de savoir. Ce savoir  leur a été transmis par d’éminents docteurs de la loi dont ils ne peuvent douter. Après tout, ils s’appuient sur les écritures qu’ils lisent, étudient et connaissent « parfaitement ». Je voudrais mettre en avant la pensée qui guide leur réflexion tout au long de cet épisode : « Cet individu ne peut pas venir de Dieu puisqu’il ne respecte pas le sabbat. » Et si on lit les écritures, on trouve dès les 10 commandements (exode 20v8) : « Pense à observer le jour du sabbat. Fais-en un jour consacré à l’Eternel. »  Le problème est qu’ils n’avaient pas compris le sens de ce jour. Jésus voulait le leur révéler. Le sabbat était un moyen par lequel Dieu montrait qu’il voulait être en relation profonde avec les hommes pour les restaurer. Mais la certitude d’une application légaliste des écritures déforme la vision de ces pharisiens, elle les aveugle complètement en leur faisant croire qu’ils voient mieux que les autres. Pourtant la simplicité de l’ancien aveugle les perturbe au point de faire une enquête….mais refusant de voir la vérité qui les dérange, ils deviennent violents, jugent et excluent ceux qui ne vont pas dans le même sens qu’eux. Ils sont en colère et provoquent la peur chez ceux qui les côtoient.

Cet épisode m’a profondément fait réfléchir. Il est si facile humainement, de juger et d’exclure ceux qui ne croient pas comme moi. Je peux même m’appuyer sur les écritures et avoir un raisonnement théologique apparemment excellent mais si je m’éloigne du désir profond de mon Père céleste qui est d’aimer, de restaurer, d’accueillir, je ne serai pas meilleure que ces pharisiens. Certes, Jésus n’a guéri quelqu’un de cette manière qu’une fois mais que c’est étrange, c’est …sale ! Vais-je passer à côté de la bénédiction de Dieu parce qu’il n’agit pas d’une manière acceptable à mes yeux ? Je ne dis pas qu’il faut tout accepter comme venant de Dieu ou que les écritures ne servent à rien. Mais je ne dois pas les lire sans me laisser conduire par l’Esprit qui donne la vie. Mes propres pensées ou les pensées que les hommes m’ont enseignées peuvent m’aveugler. Je n’ai qu’une prière : Père, ouvre mes yeux, guéris-les afin que je vois comme on voit dans ton royaume.